Épisode 1 : « Le Fantôme de l’Hôtel Paradisio »

Ils pénétrèrent dans la salle de bal, une immense pièce avec un plafond haut, décoré de moulures dorées, autrefois éclatantes. Les murs étaient couverts de miroirs fissurés, reflétant de vagues silhouettes dans la faible lumière. Des chandeliers imposants pendaient au-dessus de leurs têtes, poussiéreux, mais toujours majestueux.

Seb fit quelques pas dans la pièce, regardant autour de lui. « Ça devait être magnifique à l’époque, » murmura-t-il.

« Et ça va l’être à nouveau, si tout se passe comme prévu, » répondit Francky, sortant un petit tambourin de son sac.

Ils s’avancèrent vers la scène au centre de la pièce. Un micro argenté trônait là, fièrement dressé, malgré les années de silence qui l’avaient entouré. Francky le frôla du bout des doigts. « Ça fait longtemps que personne n’a chanté ici… » dit-il, la voix empreinte de respect.

Soudain, un courant d’air glacé traversa la salle, faisant frissonner les deux hommes. Le micro grésilla légèrement, comme s’il était hanté par des souvenirs enfouis.

« C’est peut-être lui, » chuchota Seb, un sourire narquois aux lèvres.

Francky acquiesça, ses yeux s’allumant d’une lueur de défi. « C’est peut-être notre chance de découvrir ce qui s’est vraiment passé ici. » Il leva son tambourin et frappa doucement le premier rythme. Le son résonna, se répercutant contre les murs couverts de miroirs, comme un écho venant de l’autre côté du temps.

Alors qu’ils continuaient à jouer, les chandeliers au-dessus d’eux se mirent à osciller doucement, projetant des ombres étranges autour de la salle. Une silhouette éthérée apparut dans l’un des miroirs, se déplaçant au rythme de la musique. Les murs semblaient murmurer, une mélodie lointaine résonnait faiblement.

Soudain, une voix basse et profonde résonna à travers le micro. « Qui ose troubler ma dernière soirée ? »

Seb et Francky échangèrent un regard, légèrement hésitant. Ils avaient espéré une rencontre, mais se retrouver face à cette voix spectrale… c’était autre chose.

Francky prit une profonde inspiration. « On est là pour t’aider, mec. T’aider à finir ta chanson. »

Le silence suivit ses mots, lourd et pesant. Puis, la voix reprit, hésitante mais pleine de désespoir. « Ma chanson… Je… je ne me souviens pas de la fin… »

La silhouette dans les miroirs devint plus nette. Un homme vêtu d’un costume noir élégant, les cheveux lissés en arrière, se tenait là, serrant un vieux micro argenté. Ses yeux trahissaient une infinie tristesse.

« Bobby Varela ? » murmura Seb.

Le fantôme acquiesça lentement. « Je suis piégé ici… condamné à errer jusqu’à ce que je termine ma chanson… mais les notes m’échappent… les paroles se dérobent… »

Francky fit un pas en avant, le tambourin toujours en main. « On peut t’aider, Bobby. Tu te souviens du début ? »

Bobby ferma les yeux, luttant pour se souvenir. « Le début… oui… c’était une chanson sur elle… sur Maria… »

Les murs de la salle de bal s’animèrent, montrant des fragments de souvenirs : un couple dansant sous les lustres, un sourire échangé, une chanson douce qui résonnait.

Seb frappa un rythme régulier sur son tambourin. « On va te suivre, Bobby. Commence quand tu es prêt. »

Le fantôme inspira profondément, et une mélodie douce et mélancolique s’éleva. Bobby commença à chanter, d’abord hésitant, puis sa voix retrouva peu à peu sa puissance d’antan. Les murs semblaient vibrer, les miroirs reflétaient des scènes du passé. Seb et Francky se laissèrent porter par la musique, ajoutant des percussions pour soutenir la voix spectrale de Bobby.

Mais alors que la chanson approchait de sa fin, une force invisible sembla se déchaîner dans la salle. Les lustres se mirent à trembler, les miroirs se fissurèrent davantage, et des murmures en colère résonnèrent autour d’eux.

« Qu’est-ce que c’est que ça ? » cria Seb, essayant de maintenir le rythme malgré le chaos.

« C’est le passé qui se rebelle, » répondit Bobby, les larmes aux yeux. « Elle ne veut pas que je parte… elle m’a piégé ici… »

Francky comprit soudain. « C’est Maria… Elle t’a enfermé ici avec ta propre musique ! »

Le fantôme hocha la tête, sa voix brisée par l’émotion. « Je l’aimais… mais elle ne supportait pas de me perdre… alors elle m’a condamné à errer pour toujours… »

Seb et Francky échangèrent un regard déterminé. « On va te sortir de là, Bobby. On va terminer cette chanson ensemble. »

Ils intensifièrent le rythme, jouant plus fort, défiant les forces invisibles qui tentaient de les arrêter. Bobby, les yeux clos, chanta les dernières notes, sa voix résonnant comme un appel désespéré.

Et puis, il y eut un éclat de lumière, une explosion de son… et tout s’arrêta.

Le silence tomba sur la salle de bal. Les miroirs s’étaient brisés, les chandeliers s’étaient stabilisés, et l’esprit de Bobby Varela avait disparu.

Francky abaissa son tambourin, haletant. « On a réussi… »

Seb, les mains encore tremblantes, regarda autour de lui. « Il est enfin libre… »

Ils restèrent un moment silencieux, écoutant l’écho de la dernière note. Puis, Francky se mit à sourire. « On dirait qu’on a encore fait du bon boulot, partenaire. »

Seb éclata de rire. « Ouais… mais la prochaine fois, on devrait peut-être choisir un endroit moins hanté. »

Ils quittèrent la salle de bal, laissant derrière eux un hôtel redevenu silencieux, enfin apaisé.

FIN